Je suis née dans un petit village perdu dans les montagnes.
Mes parents tenaient une auberge ; l'auberge de « Pied tordu » (car la route était fait de gros cailloux où les gens se tordaient souvent les chevilles). C'était une vieille batisse de 2 étages construite à flanc de rocher ; l'entrée se faisait par un escalier qui descendait au sous-sol où se trouvait la taverne. Puis si le voyageur voulait dormir, il pouvait monter au rez-de-chaussée dans une de nos 4 chambres. Nous, nous vivions au 1er étage, sous le toit. On pouvait y monter soit en utilisant l'escalier extérieur soit en montant depuis l'auberge par une petite porte cadenassée.
Les voyageurs qui traversaient les montagnes s'arrêtaient toujours chez nous avant de passer le col. On avait aussi des habitués du village qui venaient juste pour boire (il n'y avait pas de taverne dans le village).
Mes parents étaient des gens bons, et l'auberge marchait bien. Pour autant nous n'étions jamais riches, car nous nous faisions régulièrement dépouiller par des brigands ; mon père ne savait pas se battre et préférait implorer la pitié des bandits de nous laisser la vie sauve que de chercher à se défendre.
J'avais 2 grands frères et une petite sœur.
Tien, de 8 ans mon aîné, se destinait à reprendre l'auberge de nos parents. Il était grand, les cheveux roux en bataille et une grosse barbe rousse, il était très adulte et responsable, et agissait envers moi comme un grand frère protecteur, presque comme un 2ème père.
Liam, de 6 ans mon aîné, était de taille moyenne et trapu. Il laissait ses cheveux roux pousser et les attachait en une longue natte. Il se destinait au métier de forgeron, reprenant la succession du vieux forgeron du village qui n'avait jamais eu d'enfants. Il travaillait dur, buvait sec et aimait un peu trop la compagnie des femmes. Plus d'une fois, je l'ai vu monter ivre en compagnie d'une (ou plusieurs) fille. Je l'aimais beaucoup, il n'était jamais très sérieux et il avait toujours quelque chose de drôle à me montrer.
Tia, de 3 ans ma cadette, était une enfant de santé fragile et pleurnicharde. Elle m'embêtait parce qu'elle passait son temps à se plaindre de tout, et à geindre dès que quelque chose n'allait pas dans son sens. Elle était souvent malade et ma mère passait son temps à s'occuper d'elle. Qu'importe, je préférais passer du temps avec mes frères et avec les clients de la taverne, qui avaient des tas de choses à me raconter.
Pendant toute mon enfance, j'ai vécu entourée de ma famille, mais aussi de nombreux voyageurs qui me racontaient leurs histoires, d'aventuriers qui partaient à la recherche de trésors, de gens de toutes races et de tous âges qui voyagaient à travers le monde ; moi aussi, j'ai eu envie de découvrir le monde une fois devenue adulte.
Mais mon enfance a aussi été ponctuée d'évènements traumatisants, de brigands nous menaçant pour nous voler, de violence quand les gens étaient trop saouls et sortaient leurs armes. Plus d'une fois, il y eu des blessés (et même quelques morts) dans la taverne.
Quand j'avais 9 ans, une bande de brigands est venue pour nous dépouiller. Ils ont fait fermer la taverne, et nous ont enfermé (nous, enfants) dans un débarras. On entendait des bruits de coups, mon père qui criait « Laissez-la ! Arrêtez » et ma mère qui hurlait. Liam, fou de rage, a réussi à défoncer la porte et a foncé vers eux avec un baton. Mais ils étaient 5, il s'est fait frapper de tous les côtés, puis l'un d'eux a sorti sa dague et l'a poignardé à 3 reprises. Les brigands sont partis, emportant le butin qu'ils avaient rassemblé et nous ont laissé. Liam est resté inconscient pendant 3 jours, on se relayait tous à son chevet et il a finit par s'en sortir, mais de justesse. Il en a gardé de grosses cicatrices sur le torse et sur le flanc.
Mon père nous a fait la morale en nous expliquant qu'il ne fallait jamais essayer de se battre avec ce genre d'individus, parce que c'est trop dangereux. Mais moi, dans mon for intérieur, ma voix naissante de guerrière me hurlait qu'au contraire, si on avait tous agit, on aurait pu se défendre.
A partir de ce moment-là, je profitais de la présence d'aventuriers pour leur demander de m'apprendre à me battre. Je ne voulais pas être faible comme je l'avais été, je voulais être capable de me défendre et de défendre mes proches.
J'avais 17 ans quand ils sont entrés dans la taverne. Un duc et toute son escorte. Le duc avait un physique malingre, il était vieux et ses yeux respiraient la mort. Tia était venue les accueillir et leur proposer à boire. Les gardes du duc se mirent à boire, et le duc demanda à manger. Tout ce petit monde était bruyant et agité ; moi, j'étais assise, seule, dans un coin sombre de la taverne, je buvais ma choppe de bière, perdue dans mes pensées.
Puis Tia revint avec une nouvelle tournée, et au moment de passer devant le chef des gardes, celui-ci l'attrapa et commenca à la peloter. Tia essaya de s'échapper, mais le garde était très grand et très fort, il rigola et commença à être plus insistant. Puis il se tourna vers ses collègues et leur proposa de « se partager ce joli petit lot ». En un instant, les gardes commençaient à l'attraper de toutes parts et elle se mit à crier.
Je me suis immédiatement levée et j'ai sorti mon épée. Le duc, me voyant arriver, leva la main vers ses gardes et dit « Stop ». Ils s'arrêtèrent immédiatemment et Tia put s'échapper et se réfugier derrière Tien qui tenait le comptoir.
Le duc me demanda ce qui justifiait que je sorte mon arme.
« Ils ne font que s'amuser » lanca-t-il d'un air dédaigneux.
« Cette jeune fille est ma sœur et elle n'avait pas l'air de s'amuser. »
« C'est cette jeune allumeuse qui est venue nous séduire, peut-être était-elle fachée que mes gardes ne l'aient pas payée avant de l'allonger ? » s'esclaffa le duc, provoquant des rires de ses gardes
La colère me monta au nez et d'un seul coup, je me jetai sur le duc. Le chef de la garde se leva pour parer mon coup, mais je réussis à égratigner le duc à l'épaule. Les gardes se levèrent et commencèrent à m'encercler. Mon père qui était resté pétrifié tout ce temps se mit à me crier « Lache ton épée, Lana, tu vas nous attirer des ennuis ! ».
Tien sortit de derrière son comptoir, un baton à la main. « S'il vous plait, je vais vous demander de sortir. Nous sommes une famille respectable et nous ne cherchons pas à nous battre, mais nous ne nous laisserons pas insulter non plus. »
Le duc se leva, l'air amer, et ordonna à ses hommes de partir.
Une fois le duc parti, Tia se jeta dans mes bras pour me remercier. Mon père en revanche se mit à vociférer contre mon caractère belliqueux, et m'accusa d'avoir mis la famille en danger. Je ne l'écoutais pas, j'étais tellement fière d'avoir sauvé ma sœur et d'avoir pu chasser ces ignobles individus …
Sauf que cette nuit-là, après que nous ayions fermé la taverne, les hommes du duc sont revenus.
Tout ce que j'ai entendu, c'est des cris, puis Tia qui me secouait en me pressant de sortir. Quand j'ai ouvert les yeux, je ne voyais rien d'autre que du gris. La main de Tia me tira hors de mon lit, puis sur le palier. Il faisait affreusement chaud et je ne comprenais pas ce qui se passait.
Puis j'ai entendu des gens hurler « Au feu », et quand je suis sortie, j'ai vu l'horreur. Tout le côté droit de l'auberge était en flammes, des gens s'agitaient tout autour de la maison, ma mère était tombée dans les pommes et mon père était à ses côtés. Tia pleurait accrochée à mon bras, alors que Tien, le visage couvert de suie et les vêtements à moitié brulés hurlait à la mort devant le corps de Laila, sa femme, qui n'avait pas survécu.
En voyant ça, j'ai compris que je ne pouvais plus rester. Ils allaient tous m'en vouloir de m'être battue, ils allaient dire que tout ça était de ma faute. Alors même que l'auberge était encore en train de brûler, j'ai couru chez Liam, qui habitait avec sa femme et son fils tout en bas du village. Il venait d'être réveillé par les cris et l'agitation, et au moment où j'arrivais, découvrait avec horreur les flammes qui dansaient au loin, en direction de l'auberge familiale.
Je lui ai tout expliqué, et complètement en panique, je lui ai demandé de m'aider à m'enfuir. Il tombait des nues, et voulu d'abord courir les aider, mais devant mon désarroi et mes larmes, accepta de m'aider. Je n'avais rien, j'étais encore vêtue pour la nuit, il me donna une cape pour me couvrir, une épée courte qu'il avait forgée, un petit sac avec quelques vivres et des bottes de cuir. Puis il me tendit une petite bourse avec 8 pièces d'or, et me dit que c'était tout ce qu'il avait.
Il me prit dans ses bras et se mit à pleurer.
« Je t'aime, petite sœur, et je ne t'en veux pas, parce que tu n'es pas responsable de ce qui est arrivé, n'en doute jamais. Si tu sens que tu dois partir, je ne te retiendrais pas, mais promets-moi qu'un jour tu reviendras ... »
Je suis partie en courant vers la vallée, à travers les bois.
J'ai erré dans la forêt pendant 2 jours, avant de trouver un petit village où me restaurer.
Je n'avais pas beaucoup d'argent, mais je savais me battre, à chaque endroit où j'arrivais, je trouvais le moyen de rendre service à des gens, qui me donnaient à manger ou un peu d'argent en échange de mes services.
J'ai vagabondé comme ça pendant plusieurs années, je me suis beaucoup battue et j'ai appris beaucoup de choses, mais c'est un soir, après avoir trop bu et m'être réveillée avec la gueule de bois dans un souterrain en compagnie de deux autres individus, que ma vie d'aventurier a vraiment commencé.
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Sujet: Lana la guerrière 
Lun 1 Déc - 22:51
